N°9 : Confinement des acteurs : un déplacement des organisations au service de l’innovation.

Faire de la contrainte une opportunité, c’est la proposition, formulée ou non, qui sera faite à l’adolescent dit « sous-main de justice » quand il entre dans un service éducatif de la Protection Judiciaire de la Jeunesse.

C’est la proposition à celui qui n’a pas choisi d’être là et c’est la meilleure, la seule lui permettant de « reprendre la main ». On ne lui dira pas tout de suite que, pour transformer la situation contrainte en opportunité, il faut accepter la rencontre, trop inquiétant. On ne lui dira pas tout de suite que la proposition, c’est la rencontre.

C’est un exercice coûteux pour l’adolescent et c’est un pari. Tout l’enjeu du travail éducatif sera qu’il en pressente les bénéfices plus que les coûts et qu’ainsi il ne renonce pas à l’exercice de ses capacités d’action, pour, lassé par l’effort consenti, retourner au rôle qu’il connaît comme s’il lui était prescrit.

A l’échelle des institutions éducatives aussi, le contexte actuel entre missions prioritaires, continuité d’action des services publics et crise sanitaire permet de revenir sur le concept d’acteur, ni libre ni prisonnier par rapport aux contraintes mais exerçant une influence au sein de modes d’organisation bouleversés. Aujourd’hui personne ne peut contrôler une certaine forme de tumulte, l’ensemble organisé devient mobile et les acteurs appelés parfois à occuper d’autres places, inhabituelles pour eux. Alors, dans cette expérience qui bouleverse le cadre habituel du travail « les acteurs choisissent parfois d’agir et parfois de tenir leurs rôles » Norbert ALTER l’innovation ordinaire, PUF, 2000.

Quoi qu’il en soit cette situation singulière ouvre des questions qui, si elles ne sont pas nouvelles dans les organisations de travail, deviennent incontournables et nécessitent qu’on s’y attache. Pour exemple, comment travailler tous ensemble sans être toujours tous là ? Les outils de communication actuels, si précieux à l’heure du télétravail, ne couvrent pas le champ de la question, bien plus vaste, qui est celui de la transmission dans les équipes au travail.

Dès lors le contexte actuel d’incertitude favorise t’il une logique d’innovation ? Innovation au sens d’un processus qui donnerait lieu à de nouvelles pratiques, permettant d’imaginer de nouveaux accords, d’élaborer de nouveaux projets, de se mobiliser autrement, mieux ?


Elise TIXIER
Educatrice STEMO de Nîmes


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